La Grande Illusion, retour aux sources


Frédéric Levéziel
University of South Florida St. Petersburg


Si l’on prend en compte la définition élastique de l’emprunt dans la création artistique que Jean Renoir professe, cette “habitude d’utiliser une histoire inventée par un autre vous libère de ce qui n’est pas important” (Entretiens, 144), on peut convenir qu’apporter un éclairage judicieux sur le patrimoine génétique de sa filmographie s’annonce comme une entreprise ardue. Néanmoins, à partir d’une investigation effectuée en conjonction sur la collection Renoir à l’Université de Californie Los Angeles[i] et sur les fonds d’archives du Service historique de la Défense de Vincennes,[ii] c’est ce défi que se propose de relever ce travail: approfondir les connaissances sur la genèse de La Grande Illusion (1937) afin de dégager des axes de lecture novateurs.

Selon la biographie de Pascal Mérigeau, Renoir convoque “ses souvenirs de guerre et de chambrée, mais avant tout ceux d’un as de l’aviation française . . . Armand Pinsard” (309) pour écrire le scénario de son vingtième film. Ces prémisses étant posées, une première observation s’impose d’emblée: Renoir est indéniablement familier avec le microcosme militaire de la Grande Guerre.

En fait, dès l’âge de dix-huit ans, en février 1913, Renoir devance l’appel en s’engageant dans les dragons. Lorsque l’ordre de mobilisation générale est décrété, il est maréchal des logis. Pendant le conflit, il sert dans le 1er régiment de dragons mais languissant dans la cavalerie il est muté à sa demande dans l’infanterie, 6e bataillon alpin de chasseurs à pied. Finalement, après avoir reçu une balle dans la jambe au cours d’une patrouille en 1915, ne pouvant ainsi continuer à servir dans les chasseurs alpins, il est affecté, à sa requête, dans l’aéronautique militaire en 1916. Initialement, il doit se résigner à être observateur. Malgré tout, en août, il obtient son brevet de pilote. En octobre, il intègre l’escadrille de reconnaissance C64 aux commandes d’un biplace Caudron G6. Il est chargé de missions de reconnaissance d’objectifs, d’observation et de prise de photographie.

Malheureusement, la mauvaise fortune le poursuit. À la mi-décembre, son avion s’écrase au sol. Son passage dans l’aéronautique militaire en tant que personnel navigant s’achève prématurément en novembre 1917 à la suite d’un nouvel incident. À la clôture de la der des ders, il est reversé dans les dragons où il est promu lieutenant. En 1919, après différentes affectations sans grand relief, il renonce à sa vocation juvénile autant par choix que par nécessité. Il “passe dans la réserve en décembre de la même année” (Launey 84) car il est considéré inapte au service actif, n’étant plus physiquement capable de servir dans son arme d’origine, la cavalerie.

Dès ses premiers pas derrière la caméra, Renoir tire bien entendu parti de son expérience sous les drapeaux. Pourtant, étonnamment, les personnages appartenant à l’univers militaire mis en scène avant La Grande Illusion ont une tonalité totalement différente. En effet, Renoir a recours aux stéréotypes dans un registre satirique où règne la mesquinerie. “La suffisance et la médiocrité de certains militaires . . . sont [pour Renoir] . . . des ressorts dramatiques classiques” (Calais 98). Dans le vaudeville militaire Tire-au-flanc (1928), le ton appartient au comique troupier et l’argument repose sur la dénonciation par l’absurde de l’uniforme. Dans La Chienne (1931), à travers le personnage de l’adjudant Godart, qui usurpe l’identité d’un soldat disparu au feu pour échapper à son épouse acariâtre, Renoir dénonce le passé pas toujours héroïque de quelques mobilisés de 14. Finalement, dans Le Crime de monsieur Lange (1935), le concierge s’érige en “caricature du crétin français. . . . Ancien combattant, rescapé des expéditions coloniales, . . . [il] cultive . . . une solide xénophobie à l’égard de tout ce qui n’est pas hexagonal” (Calais 145).

Maintenant, en ce qui concerne le pilote de chasse Pinsard, Renoir déclare dans ses mémoires que l’“histoire de ses évasions me sembla un bon tremplin pour un film d’aventures” (Ma vie, 139). Selon Mérigeau, c’est “en 1916 que le cinéaste aurait rencontré Armand Pinsard” (309). Notons au passage l’aspect contingent du conditionnel. En fait, selon Renoir, un concours de circonstances aurait provoqué cette rencontre pendant son affectation à la C64:

Un certain matin, je fus appelé au bureau du capitaine qui me présenta un type de l’État-Major chargé d’une mission. . . . Tout se passa bien jusqu’au moment où un Focker de chasse . . . lâcha une volée de balles. . . . [Un] troisième protagoniste fit son apparition. Je reconnus un avion de l’escadrille française de chasse du secteur. . . . Le Spad . . . lâcha une rafale de mitrailleuse. . . . Outre le fait qu’il m’avait sauvé la vie, . . . Pinsard et moi devînmes bons amis. (Ma vie, 137–38)

Ici, tout semble parfaitement limpide mais, après coup, cet épisode, qui s’est supposément déroulé en 1916, ne paraît pas concorder avec les états de service de Renoir et de Pinsard.

Avant toute chose, signalons les mots liminaires de la citation, un “certain matin,” qui n’ancrent pas l’occurrence dans le temps. Ensuite, si l’intervention de Pinsard se solde par un succès comme on pourrait le penser, vu que le présumé sauvetage de Renoir doit avoir lieu après le 28 octobre, jour de son affectation à la C64, et avant la mi-décembre, date de son premier accident, l’intervention de Pinsard ne peut pas correspondre aux victoires aériennes non homologuées de Pinsard d’août et de septembre 1916 ni coïncider non plus avec celles de 1917. En ultime instance, l’incident pourrait se recouper avec la première victoire homologuée de Pinsard du 1er novembre 1916.

Malgré tout, les données géographiques, les opérations militaires et la description de la joute aérienne ne paraissent pas cadrer avec les souvenirs de Renoir. Observons les données suivantes. L’escadrille de chasse N26, où Pinsard est attaché du 15 juillet au 29 novembre 1916, est stationnée à Cachy dans la Somme du 6 juin 1916 au 27 janvier 1917. Rattachée au Groupe de combat 12 à partir de juin 1916, la N26 fait partie du groupe des Cigognes. La victoire du 1er novembre 1916, qui vraisemblablement s’inscrit dans le contexte de la bataille de la Somme où est engagée la légendaire escadrille à cette époque, s’effectue à peu près à soixante kilomètres au nord-est de Cachy à Léchelle dans le Pas-de-Calais. Par opposition, l’escadrille de reconnaissance C 64 de Renoir est stationnée du 4 août 1916 au 26 février 1917 à La Cheppe dans la Marne en Champagne. Rattachée à la 4e armée de janvier 1916 à février 1917, la C64 n’intervient pas pendant la bataille de la Somme.

En outre, l’unique description fiable de la première victoire de Pinsard est sa citation à l’ordre de l’armée du 12 novembre 1916. Celle-ci diffère notablement du récit de Renoir: “Brillant pilote, très consciencieux, le 1er novembre 1916 [Pinsard] a attaqué 6 avions ennemis qui marchaient groupés et a abattu l’un deux” (Service historique de la Défense). Plus probablement, ce n’est donc pas en 1916 mais en 1934 que les chemins de Renoir et Pinsard se croisent. Toujours dans ses mémoires, Renoir décrit ainsi la supposée deuxième rencontre avec Pinsard durant le tournage de Toni (1935) en 1934:

Non loin des Martigues, il y a un énorme champ d’aviation. . . . Les pilotes, . . . lorsque nous tournions en extérieur, . . . se livraient à des piqués au-dessus de nos têtes. . . . Pierre Gaut . . . me proposa de rendre visite à l’officier commandant le terrain. . . . À peine en présence de ce personnage, . . . j’eus la sensation de l’avoir vu quelque part. C’était . . . Pinsard. . . . Lui et moi prîmes l’habitude de dîner ensemble. . . . Pendant ces réunions il me racontait ses aventures de guerre. (Ma vie, 138–39)

Un mois après la première de La Grande Illusion, en juillet 1937, dans une lettre adressée à son avocat, Maître Rappoport, Renoir semble même fournir involontairement la clé de l’énigme: “Cher Maître . . . je n’ai pas pu joindre le colonel Pinsard, . . . mais M. Gaut, l’ancien officier qui me l’a présenté et qui a été témoin de nos conversations, viendra témoigner.”

Ouvrons ici une parenthèse afin de mieux cerner le problème. Gaut, le producteur de Toni, s’engage dans l’infanterie puis passe à l’aéronautique en janvier 1916. En fait, Gaut et Pinsard se côtoient au sein de l’escadrille de chasse N26 en 1916. Renoir et Pinsard n’auraient donc pas renoué contact en 1934 mais ce serait plutôt Gaut qui aurait présenté Pinsard à Renoir pendant le tournage de Toni au cours de l’été 1934, ce qui rejoint l’hypothèse formulée par Mérigeau: “jamais le héros de la guerre aérienne n’a sauvé la vie de l’aviateur Renoir” (342). Cette information revêt toute son importance car elle situerait sans équivoque la genèse de La Grande Illusion en 1934 et non en 1916.

Par ailleurs, on pourrait s’interroger sur les raisons pour lesquelles Renoir prend des libertés avec les faits. Pour cela, il faut s’en remettre à deux précédents. En 1928, aux balbutiements de sa carrière cinématographique:

[L]es copies de La Petite Marchande d’allumettes sont saisies par la justice. . . . La veuve et le fils d’Edmond Rostand affirment que le film de Renoir . . . démarque étroitement le conte lyrique La Marchande d’allumettes . . . dont ils sont les auteurs. (Mérigeau 114)

De même, en juin 1937, au moment de la sortie de La Grande Illusion, un ancien aviateur, fait prisonnier, puis évadé d’un camp en Allemagne, Jean des Vallières, et son éditeur, Albin Michel, portent plainte pour plagiat. Ils soutiennent que La Grande Illusion a eu recours à de nombreux emprunts, sans les citer, au roman autobiographique de des Vallières, Kavalier Scharnhorst.

De plus, un autre élément doit être considéré pour comprendre la posture de Renoir. Quelques mois après la sortie du film, en décembre 1937, un journal nationaliste et monarchiste de l’époque, L’Action française, défraye la chronique en alimentant les soupçons de plagiat. Le polémiste Lucien Rebatet, sous le pseudonyme de François Vinneuil, dénonce le fait que:

Jean Renoir et M. [Charles] Spaak, [son scénariste] dans La Grande Illusion, ont utilisé différents traits de Kavalier Scharnhorst, en oubliant de le dire, sans doute parce que M. Des Vallières est un “fasciste!” (4)

Dans les années 30, dans le contexte de la montée du Front populaire, l’engagement politique de Renoir est clairement orienté vers la défense de la cause ouvrière, que ce soit dans sa rubrique hebdomadaire dans le quotidien communiste Ce Soir ou à travers sa production cinématographique. Presque logiquement, en tant que compagnon de route du Parti communiste, Renoir se refuse à se voir associé avec un individu appartenant à la mouvance d’extrême droite. Dans une lettre du 25 juin 1937 adressée à Louis Aragon, Renoir décrit le roman de des Vallières comme un “bouquin assez haineux, . . . écrit dans un esprit de nationalisme étroit et désagréable.”

En fin de compte, échaudé par les embarrassants épisodes de 1928 et de 1937, le fait que Renoir trahisse sa mémoire, pourtant eidétique, doit s’interpréter dans le contexte de sa réfutation de l’accusation de des Vallières. Si Renoir rencontre Pinsard en 1916, l’origine de La Grande Illusion précède la publication du roman en 1931 et d’une certaine façon l’absout de tout soupçon. De toute façon, bien qu’en juillet 1937 l’arbitrage de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques conclut à un non-lieu, une “somme importante, dont il ne devait être fait aucune mention, fut néanmoins versée à l’auteur de Kavalier Scharnhorst” (Viry-Babel 47). Selon Philippe de Vita, le dernier en date à passer au peigne fin les similarités entre La Grande Illusion et Kavalier Scharnhorst, “le plagiat du roman par Renoir et Spaak est partiel, indirect et occulté. Il s’est produit par une réminiscence, qui n’est pas restée inconsciente . . . il est permis de penser que l’utilisation du Kavalier Scharnhorst a été intentionnelle” (126).

À ce stade de l’analyse, plusieurs idées prennent forme. De prime abord, Renoir possède une connaissance de première main du microcosme militaire. En second lieu, Renoir aurait connu Pinsard en 1934 et c’est à partir de ce concours de circonstances qu’il dactylographie un premier synopsis “de 17 feuillets” (Curchod 186) intitulé Les Évasions du colonel Pinsard. Enfin, pour ce qui est des ajouts et réagencements qui s’opèrent du synopsis de 1934 à la mouture définitive de 1936, une consultation de l’ouvrage d’Olivier Curchod, La “Méthode Renoir”: Pleins feux sur Partie de campagne (1936) et La Grande Illusion (1937), s’avère indispensable.

Maintenant, tout en admettant que la réalité de Pinsard et la fiction de Renoir reposent sur un tronc commun, pour passer d’un synopsis de 17 feuillets à un découpage technique “de 231 feuillets” (Curchod 187), Renoir et Spaak ont dû, bien évidemment, apporter leur pierre à l’édifice. Quoi qu’il en soit, ce qui nous intéresse ici, ce n’est pas de disséquer le Kavalier Scharnhorst ou les retouches successives du scénario, exercices précédemment réalisés, sinon d’examiner l’origine la plus en amont de la genèse du film, son aiguillon. Surtout que, si l’on accorde de l’importance à un détail jusqu’à présent ignoré, les différences entre cet aiguillon et l’ultime découpage se révèlent significatives.

Considérons les sources primaires disponibles. Par opposition à bon nombre de ses contemporains, Pinsard ne publie pas ses récits de captivité au cours de l’entre-deux-guerres. Ses souvenirs, Du ciel à l’enfer, paraissent à titre posthume en 2004, plus de cinquante ans après sa mort. C’est à Joseph Romanet, alias Jacques Mortane, écrivain spécialisé dans le journalisme d’aviation militaire pendant la Grande Guerre, que l’on doit la vulgarisation des exploits de Pinsard. Malheureusement, la critique, qui a axé sa recherche sur Mortane à l’heure de se référer à Pinsard, omet de prendre en considération un de ses penchants. La passion qui anime Mortane a pour conséquence de convertir son écriture journalistique en écriture romanesque.

En fait, le compte rendu le plus vraisemblable de l’odyssée de Pinsard en Allemagne, Pinsard chez les Boches, est publié par son frère d’armes, le capitaine Pierre Weiss, qui s’est “vu confier les papiers personnels et le carnet de route de son ami” (1). La lecture de cette source nous réserve plusieurs surprises de taille. Dès la réception du pilote, Pinsard, et de son observateur, Amaudric du Chaffault, forcés d’atterrir en territoire ennemi lors d’une mission de reconnaissance aérienne en février 1915, de nettes divergences se manifestent avec le scénario final de La Grande Illusion. Une fois capturés, Pinsard et du Chaffault sont “conduits au village, . . . [puis] dans les dépendances du château de Folembey” (Weiss 12). Le lendemain, à jeun, un gradé leur communique sans ménagement la sommation suivante: “le colonel m’a chargé de vous inviter: c’est un ordre!” (Weiss 13). Le commandant prussien les convie à un déjeuner, constitué de “bouteilles volées . . . [après avoir] vidé les armoires . . . [du château qu’il a conquis manu militari, le] salut aux deux Français est courtois . . . [mais] cette chevance vise à délier les langues. C’est le moment de ne pas se déboutonner” (Weiss 14).

Loin d’être dupe, Pinsard refuse catégoriquement de boire le vin offert par les Prussiens, arguant “rien que de l’eau, depuis mon entrée dans l’aviation!” (Weiss 15). Devant l’attitude défensive et la réponse autant confiante qu’arrogante de Pinsard quant à l’issue de la guerre, une “victoire pour nous, certaine, indiscutable, colonel. . . . Nous avons le nombre, la foi, le monde entier à nos côtés” (Weiss 14–15), “la contenance des boches [devient] plus embarrassée. Après avoir collectionné quelques déceptions, le colonel lève la séance” (Weiss 15–16).

Ici, on est aux antipodes de l’hospitalité, de la correction et du cérémonial du commandant d’escadrille, von Rauffenstein (Erich von Stroheim), dans la scène parallèle de La Grande Illusion. Le hobereau prussien claque des talons devant le capitaine d’origine aristocrate de Boeldieu (Pierre Fresnay), lui serre la main, puis l’invite, ainsi que son pilote le lieutenant Maréchal (Jean Gabin), à déjeuner à son mess. Lors de ce coudoiement initial, von Rauffenstein babille obligeamment avec de Boeldieu à propos de leurs affinités mondaines communes. L’expression de la méfiance, du dédain et de l’animosité envers l’ennemi de Pinsard se substitue à une entente cordiale aristocratique et à une fraternité prolétarienne chez Renoir. La caste nobiliaire, de Boeldieu et von Rauffenstein, se comprend à merveille tandis que les plébéiens, Maréchal et un officier allemand, tous deux anciens ouvriers chez Gnome avant-guerre, s’entendent comme larrons en foire.

Un an plus tard, en février 1916, Pinsard est transféré au camp de représailles d’Ingolstadt où sont réunis les officiers récidivistes de l’évasion. “Pinsard fut jeté dans les oubliettes du fort Prinz Karl” (Weiss 45). Encore une fois, Renoir choisit un angle diamétralement opposé, celui des retrouvailles dans une atmosphère bon enfant. Von Rauffenstein esquisse une moue ironique à l’heure d’énumérer les tentatives d’évasion de de Boeldieu et de Maréchal. En dernier lieu, un autre élément change complètement de valeur lors de la transition de la réalité à la fiction: le rôle joué par les envois aux prisonniers en Allemagne.

Selon Weiss, les “colis de France firent des miracles. Pinsard . . . la nuit, [fouillait] leurs entrailles. . . . Un poulet froid éventré rend un browning et des cartouches. Il y a une boussole et un poignard dans un jambonneau; . . . dans l’épaisseur de la reliure d’un livre une scie à métaux” (26–27). Dans La Grande Illusion, la fonction des victuailles en tant qu’accessoires pour s’évader se métamorphose en lutte des classes. La générosité ostentatoire de Rosenthal (Marcel Dalio) envers ses compagnons de chambrée se convertit en une passation de pouvoir symbolique. L’aisance économique des nouveaux riches, la grande bourgeoisie des Rosenthal, relègue au second plan la théâtralité aristocratique surannée de de Boeldieu. De la même manière, les livres, en tant qu’objets destinés à faciliter une tentative d’évasion, deviennent l’illustration d’une des rares activités permises dans certains camps, la lecture.

Ces divers exemples démontrent que Renoir et Spaak choisissent une route qui bifurque parfois totalement vis-à-vis du témoignage originel de Pinsard. Plus surprenant encore, les propos de Renoir sur la genèse de La Grande Illusion, tirés d’un échantillon non exhaustif d’entretiens et de textes recueillis dans un éventail de publications de l’époque, évoluent au fil du temps. De sa campagne de promotion en 1937, à sa première parisienne le 9 juin 1937 au Marivaux, à sa reprise triomphale en 1946 au Normandie, jusqu’à sa dernière sortie, du vivant de Renoir, en 1958 au Studio Publicis, toujours en exclusivité à Paris, on assiste à une véritable transformation du discours du cinéaste.

Juste avant la sortie du film, en mai 1937, dans une interview accordée à la revue Cinémonde, Renoir affirme que:

[L]e scénario de La Grande Illusion, nous l’avons tiré, Spaak et moi, de récits directs qui nous ont été faits par d’anciens prisonniers de guerre. Spaak par son frère, moi par des amis intimes, . . . une documentation . . . que nous avons eu l’idée de compléter . . . auprès de la Ligue des Évadés de guerre. (Fainsilber 457)

Initialement, Renoir ne révèle aucun nom en particulier à la presse spécialisée, ni d’anciens prisonniers de guerre, ni de membres de l’Amicale des évadés de guerre, qu’il identifie comme la Ligue des Évadés de guerre. Paradoxalement, Renoir n’évoque pas son expérience personnelle, et il ne mentionne à aucun moment ni Pinsard ni le commandant Louis de Goÿs de Mézeyrac, qui, en collaboration avec le célèbre aviateur Roland Garros, crée en 1917 l’Amicale des évadés de guerre. Rappelons, si besoin est, que dans ses mémoires de 1974, Renoir insiste sur le fait que le récit de Pinsard est la raison du triomphe et constitue le canevas de La Grande Illusion.

Dans un premier temps, Renoir se réfère exclusivement à Paul-Henri Spaak, le frère de son scénariste. Pour l’anecdote, en 1916, Spaak tente de rejoindre l’armée belge. Trahi par son passeur, il est emprisonné en Belgique puis en Allemagne. Ici, un seul élément narratif digne d’intérêt apparaît aussi bien dans La Grande Illusion que dans l’autobiographie de Spaak: une représentation scénique. Pendant ses deux ans de captivité, Spaak est membre de la troupe théâtrale du camp: “J’ai été distribué dans plus de trente pièces, comédies, vaudevilles et mélodrames” (Spaak 35).

Il faut néanmoins attendre les allégations de plagiat de 1937 pour qu’au mois de juin de la même année, Renoir, dans une lettre adressée aux éditions Albin Michel et à des Vallières, cite plus précisément ses sources d’inspiration en se livrant à un exercice de reconstruction génétique du film: “le récit de M. Aget, le récit de M. Buno-Varilla, . . . le récit de M. Gaudet. . . . Parmi ces messieurs, qu’il me soit permis de citer M. Etevenon . . . [et le] lieutenant Bastin.” Des patronymes précédemment cités, deux sont aisément reconnaissables encore de nos jours, le pionnier de l’aviation Étienne Bunau-Varilla, orthographe corrigée, et l’officier de cavalerie belge Jules Bastin. Concernant le parcours de Bunau-Varilla rien de transcendant ne peut être relevé en relation avec La Grande Illusion, si ce n’est qu’en 1915, au retour d’une mission de bombardement, le biplan qu’il pilote en compagnie de son navigateur, de Goÿs de Mézeyrac, est victime d’une avarie. À la suite d’un atterrissage forcé en territoire ennemi, Bunau-Varilla et de Goÿs de Mézeyrac sont faits prisonniers. Observons au passage que de Goÿs de Mézeyrac est un des deux fondateurs de l’Amicale des évadés de guerre.

Bastin, quant à lui, n’est pas un aviateur mais il représente un cas beaucoup plus intéressant. Ce héros belge est capturé lors d’une mission de reconnaissance pendant l’invasion de la Belgique. Durant ses années de détention, il se distingue par sa persistance inusitée à recouvrer la liberté. À son dixième essai, il parvient à rejoindre les Pays-Bas. Il est à noter que Bastin publie ses mémoires, La lutte pour la liberté. Mes dix évasions, 1914–1917, en 1936, mais nous y reviendrons ultérieurement, et qu’il compte parmi ses compagnons de captivité, Garros, un des deux fondateurs de l’Amicale des évadés de guerre.

Un mois plus tard, en juillet 1937, dans une lettre adressée à Édouard Aget, déjà mentionné dans la lettre de juin 1937, toujours dans le but de réfuter l’accusation de plagiat, Renoir concède qu’il a puisé à d’autres sources. La “vie des prisonniers de guerre n’appartient pas plus à des Vallières qu’à Harcourt, qu’à Bastaing ou qu’à bien d’autres.” De nouveau apparaît le nom de Bastin, mal orthographié. Plus prenant encore, Renoir nomme pour la première fois d’Harcourt. Voyons cela de plus près.

Jean d’Harcourt, membre d’une des plus anciennes familles de la noblesse française, la maison d’Harcourt, commande l’escadrille de chasse N103/Spa103 de 1916 à 1918, affectée à Cachy. En fait, la Spa103, commandée par d’Harcourt, et la Spa26 où sert Pinsard sont deux des quatre escadrilles qui font partie du groupe des Cigognes. Le binôme formé par d’Harcourt et Pinsard nous offre deux pistes supplémentaires. En effet, le pilote de chasse René Fonck construit sa notoriété à partir de 1917, lorsqu’il est muté à la Spa103, au sein des Cigognes, sous le commandement de d’Harcourt. Au contraire de d’Harcourt, Fonck publie ses mémoires de guerre, Mes combats, en 1920.

Raisonnablement, on peut concevoir que les souvenirs de Fonck n’ont pas échappé à Renoir et à Spaak. La confirmation de cette remarque survient dans un chapitre de Fonck dédié à sa visite d’un as allemand blessé dans un duel aérien. Fonck relate que l’aviateur affirme sur son lit d’hôpital: “Je suis officier allemand, à ma place vous feriez comme moi” (94). Dans La Grande Illusion, le langage et la situation paraissent extrêmement proches. Gisant sur son linceul, de Boeldieu déclare avant de rendre son dernier soupir:

BOELDIEU. J’en aurais fait autant. Français ou Allemand, le devoir c’est le devoir. (Renoir, Grande illusion (1971), 161)

À ce stade de la réflexion, le réseau social et intertextuel de Renoir et de La Grande Illusion pourrait se résumer ainsi. Entre 1934 et 1936, à la lecture plus que probable du roman de des Vallières et des mémoires de Bastin on peut ajouter que Renoir et Spaak entrent vraisemblablement en contact avec Pinsard, Paul-Henri Spaak, Bunau-Varilla et Fonck. Pendant ces échanges fructueux, Bunau-Varilla se souviendrait de son compagnon d’infortune de Goÿs de Mézeyrac tandis que Pinsard évoquerait des réminiscences de d’Harcourt. Pour couronner le tout, Garros vole avec Fonck en 1918 et Garros fait la connaissance de Bastin à Zorndorf en 1916. Lors de cet emprisonnement, Bastin s’associe même avec Garros pour tenter de s’évader du camp de représailles mais leur projet avorte quand Garros est transféré. Un scénario semblable à celui de La Grande Illusion.

En dernier lieu, bien que dans le cas de Garros le contact avec Renoir n’ait apparemment pas pu être direct, Garros étant incarcéré en Allemagne de 1915 à 1918, lors du service dans l’aéronautique de Renoir, puis abattu prématurément en octobre 1918, nous pouvons apprécier un élément qui mérite toute notre attention, le récit de son compagnon d’évasion le pilote Anselme Marchal. La scène du tour d’escamotage au moment de la fouille à l’arrivée de Maréchal et de Boeldieu au camp de Hallbach se fait l’écho de la réception de Marchal à Ingolstadt:

Futurs compagnons de captivité. Cartes! . . . Boussole! . . . Argent! . . . Passez-les . . . passez-les nous vite! (Marchal 177)

Le Groupe [de prisonniers]. . . . Planquez votre or, . . . cachez vos montres. . . . (Renoir Grande illusion (1971), 24)

Pour en revenir à d’Harcourt, le comte Robert d’Harcourt appartient également à la maison d’Harcourt. Versé dans l’artillerie, il a pour particularité d’être un homme de lettres renommé. En 1922, il raconte ses souvenirs de captivité, ce qui nous permet d’établir derechef un possible parallèle avec La Grande Illusion. De facto, un point commun à de nombreux témoignages de prisonniers, les relations entre les jeunes Allemandes et les prisonniers de guerre français, prend de nouveau une tonalité distincte chez Renoir. Dans ses mémoires, d’Harcourt retrace, non sans ironie, que l’une “après l’autre, les plus belles filles de Weissmain succombaient au prestige de la moustache française; la défense était brève, la citadelle se rendait vite” (113).

De son côté, Renoir transforme cette promiscuité en histoire d’amour entre une jeune paysanne allemande, veuve et mère de famille, et un soldat français évadé. Dans La Grande Illusion, Elsa (Dita Parlo), dont le mari a été tué au feu, recueille et protège Maréchal, mais à aucun moment elle n’est présentée comme une femme de mœurs légères. Joséphine, le seul personnage qui déroge aux conventions morales, appartient au lupanar d’Épernay et elle n’apparaît à aucun moment. Tout au contraire, l’idylle entre Elsa et Maréchal tarde à se dessiner. Plus qu’une transformation, c’est une transfiguration du réel qui s’opère ici.

Alors que La Grande Illusion s’apprête à sortir en province, Renoir, dans un article publié en octobre 1937 dans le quotidien régional Le Petit Marseillais, insiste sur sa volonté de rester fidèle à la réalité de ses anciens frères d’armes tout en ajoutant l’idée de respect qui leur est dû. “Les héros de ‘La Grande Illusion,’ je veux dire les prisonniers de guerre, ont été récompensés de leur modestie par le silence des écrivains romanesques. Le film qui a été tiré de leurs aventures n’a d’autre prétention que de leur être fidèle” (6).

Arrêtons-nous un instant sur cette citation. Lorsque Renoir parle du silence des écrivains romanesques, on ne peut s’empêcher de remarquer que l’hymne à l’amour du couple formé par Maréchal et Elsa est tout aussi chimérique que celui des personnages du roman de Pierre Benoit, Axelle: Pierre Dumaine, le prisonnier sous-officier français, et Axelle, la jeune Allemande. Dans les deux cas, on retrouve le même dilemme cornélien, le choix impossible entre l’amour et le sens du devoir. Maréchal voudrait rester avec Elsa mais son devoir de soldat l’emporte. Il se doit de regagner la France pour reprendre le combat.

Deux mois plus tard, en décembre 1937, dans Ce Soir, Renoir revient sur sa préoccupation pour la conformité historique et révèle nommément un nouveau ferment:

[Il] convenait que l’atmosphère du film était exacte, particulièrement en ce qui concerne les scènes qui se déroulent dans une popote d’escadrille allemande, scènes dont les détails ont été puisés dans les Mémoires de von Richthoffen. (Dauven 6)

Ici, la source est Manfred von Richthofen, la légende de l’aviation de la Première Guerre mondiale. Étrangement, néanmoins, le journal de guerre de l’as des as, en traduction française sous le titre Le Corsaire rouge, 1914–1918: journal de guerre, ne dévoile aucun portrait du ou d’un mess en particulier. Dans le contexte du travail sur l’authenticité du portrait des Prussiens effectué par le conseiller technique du film Carl Koch, ancien capitaine d’artillerie dans l’armée allemande, on peut se demander pourquoi Renoir se réfère à un élément jusqu’à preuve du contraire inexistant.

Enfin, bien que Renoir affirme dans la lettre adressée aux éditions Albin Michel et à des Vallières que “nous nous [Renoir et Spaak] sommes servis du livre du lieutenant Bastin Mes dix évasions, pour contrôler l’exactitude de tous les faits présentés dans le film,” étonnamment, les écrits de Bastin n’ont jamais été examinés en relation avec La Grande Illusion.

D’autant plus que les similitudes entre la réalité de Bastin et la fiction de Renoir sautent aux yeux. Dès le chapitre initial, le titre du film et son éventuelle origine font leur apparition: “Norman Angell et sa ‘Grande Illusion’” (Bastin 18). Une clarification s’impose me semble-t-il. Selon la critique, Renoir se serait inspiré du titre de l’essai, The Great Illusion: A Study of the Relation of Military Power to National Advantage, publié en 1910, puis réédité en 1935, de l’écrivain et homme politique britannique Norman Angell, pour baptiser son film. On peut légitimement se poser la question de savoir si le titre du film trouve sa souche dans le récit de Bastin.

À propos des mémoires de Bastin, aucun doute n’est permis. On assiste à une succession de ressemblances et de calques entre Bastin et Renoir. Tout d’abord, Bastin décrit un des camps de prisonniers où il est détenu comme une “tour de Babel” (19). Chaque chambrée utilise sa langue respective: le français, l’anglais et le russe. Dans cette logique de différencier les prisonniers par le langage dans la diégèse, la scène de la fouille, précédemment citée, se retrouve à la virgule près dans La Grande Illusion mais en langue anglaise. Comparons:

Un Anglais refuse de se séparer de sa montre. Au moment de la contrainte, il la jette sur le sol et l’écrase à coup de talon. (Bastin 21)

L’OFFICIER ANGLAIS. Keep your hands away! Don’t touch me! . . . Do you want my watch? L’officier sort la montre de sa poche, la jette à terre . . . et l’écrase d’un coup de talon. (Renoir, Grand illusion (1971), 24–25)

Poursuivons. En juillet 1917, Bastin est transféré à Ingolstadt, le camp où sont passés Pinsard en 1916 et de Goÿs de Mézeyrac en 1917. Le “commandant du fort . . . me fait tout de suite le plaisir de m’apprendre que mon ami . . . est ici et que nous serons logés ensemble!” (Bastin 83). Encore une fois, dans La Grande Illusion, une scène semblable se déroule. Von Rauffenstein accueille de Boeldieu et Maréchal avec courtoisie, puis leur annonce que leur ancien compagnon de camp, Rosenthal, les attend.

RAUFFENSTEIN. . . . vos camarades sont là. . . . (Renoir, Grand illusion (1971), 71)

Finalement, que ce soit le creusement du tunnel, l’évacuation des déblais à l’extérieur des baraques pendant la promenade, en utilisant des “pèlerines” (Bastin 98) pour dissimuler la terre, le lit d’un prisonnier qui cache les lattes de plancher qui font office d’entrée au souterrain, ou les conséquences de l’étouffement d’un prisonnier après un éboulement, “je remonte dans la chambre, je suis livide” (Bastin 102), une partie non négligeable des mémoires de Bastin préfigure sans équivoque certaines scènes de La Grande Illusion.

Au terme de cette analyse, intrinsèquement incomplète, il s’avère qu’approfondir les connaissances sur la genèse de La Grande Illusion constitue une nouvelle illusion tributaire du caractère polysémique de l’œuvre, de son titre et de son auteur. Entre réappropriation, citation ou simple évocation, la frontière demeure extrêmement floue chez Renoir. Pourtant, force est de constater que les différents facteurs liés à son séquençage génétique se cristallisent. D’une part, l’aiguillon, la rencontre entre Pinsard et Renoir, daterait de 1934 et non de 1916. De l’autre, la cosmogonie du film, que l’on découvre au gré des propos bien souvent palinodiques du réalisateur, a de multiples origines et est soumise à de nombreuses influences.

En réalité, ce qui est frappant, c’est qu’au fur et à mesure que le temps passe, et principalement à partir de l’accusation de plagiat de 1937, la langue du cinéaste se délie, Renoir s’évertuant à se livrer à un exercice de reconstruction du cercle intertextuel de La Grande Illusion pour se défendre d’une possible poursuite judiciaire. Seulement, la question se pose alors de savoir si cette remémoration est plus imaginaire, motivée par la crainte de la saisie du film, que réelle. De toute façon, quand bien même certains emprunts seraient involontaires, quelques ressemblances sont suffisamment saillantes pour être relevées. Pour n’en citer que deux, l’utilisation intentionnelle du roman de des Vallières, Kavalier Scharnhorst, fait aujourd’hui l’unanimité parmi la critique. Et comme l’a démontré ce travail, une partie des écrits de l’officier de cavalerie belge Bastin se retrouve sans ambages dans La Grande Illusion.

D’autre part, on doit se rappeler que, à l’heure de la rédaction du scénario, Renoir fait montre d’une grande maîtrise de la vie militaire, en particulier de l’esprit de franche camaraderie en escadrille, et qu’il dispose d’un réseau social substantiel sous la forme de l’Amicale des évadés de guerre. À cet effet, le personnage de de Boeldieu aurait été inspiré par le capitaine Louis-Marie Bossut aux côtés duquel Renoir a servi au sein du 1er régiment de dragons. En définitive, à la rencontre de Pinsard et de Paul-Henri Spaak, on peut donc vraisemblablement ajouter de nombreux contacts plus ou moins directs et la lecture d’un nombre non négligeable de mémoires d’anciens prisonniers et aviateurs, tels que Bunau-Varilla, de Goÿs de Mézeyrac, d’Harcourt, Fonck ou Marchal. Cependant, le fait demeure qu’il est raisonnable de s’interroger sur l’intentionnalité du regard porté. En effet, comme l’a établi cette étude, que ce soit dans l’adaptation ou la réécriture à l’écran, Renoir et Spaak choisissent une route qui bifurque parfois totalement vis-à-vis de la source originelle.

Étant donné que le film a, sans conteste, fait l’objet d’une documentation historique de grande envergure, les changements identifiés font preuve d’une volonté d’orienter la narration filmique. En gauchissant l’historicité de certains témoignages, Renoir nous inviterait donc à une réinterprétation de l’Histoire. Deux exemples suffisent à le montrer. À la promiscuité des jeunes Allemandes s’oppose l’hymne à l’amour chimérique du couple composé par Maréchal et Elsa. À l’expression de la méfiance, du dédain et de l’animosité envers l’ennemi de Pinsard se substitue l’entente cordiale aristocratique de de Boeldieu et de von Rauffenstein et la fraternité prolétarienne de Maréchal.

Pour aller plus loin dans la réflexion, on pourrait argumenter qu’en mettant en scène une histoire, une création fictionnelle basée sur un vaste ensemble narratif mémoriel, Renoir en arrive à reconstruire de quelque manière l’histoire des prisonniers de guerre français en Allemagne pendant la Première Guerre mondiale. Maintenant, s’attacher à expliquer ce décentrement, qui bien entendu révèle un choix idéologique, la vision iréniste de Renoir pendant les années 30, dépasserait les limites et le propos de ce travail.

 

Œuvres citées

Angell, Norman. The Great Illusion: A Study of the Relation of Military Power to National Advantage. W. Heinemann, 1935.

Bastin, Jules. La Lutte pour la liberté: Mes dix évasions, 1914–1917. Payot, 1936.

Benoit, Pierre. Axelle. Albin Michel, 1928

Calais, Séverine. “Catalogue des personnages de l’œuvre filmique de Jean Renoir.” Dissertation, Université Nancy-II, 2007.

Curchod, Olivier. La “Méthode Renoir”: Pleins feux sur Partie de campagne (1936) et La Grande Illusion (1937). Armand Colin, 2012.

Dauven, Lucien-René. “Jean Renoir nous parle. . . . Pourquoi La Grande Illusion est interdite en Allemagne et en Italie?” Ce Soir, 16 Dec. 1937, p. 6.

Fainsilber, Benjamin. “Jean Renoir fait son examen de conscience.” Cinémonde, 20 May 1937, p. 457.

Fonck, René. Mes combats. Flammarion, 1920.

D’Harcourt, Robert. Souvenirs de captivité et d’évasions. Nouvelle Librairie Nationale, 1922.

Launey, Stéphane. “Jean Renoir sous l’uniforme.” Revue historique des armées, no. 259, 2010, pp. 79–92.

Marchal, Anselme. Après mon vol au-dessus de Berlin; ma captivité́, mes évasions. Tallandier, 1919.

Mérigeau, Pascal. Jean Renoir. Flammarion, 2012.

Pinsard, Armand. Du ciel à l’enfer. Irminsul, 2004.

Rebatet, Lucien (François Vinneuil). “L’Écran de la Semaine ‘Les hommes sans nom’.” L’Action française, 17 Dec. 1937, p. 4.

Renoir, Jean. Jean Renoir: entretiens et propos. Éd. Jean Narboni, et al. Cahiers du Cinéma, 2005.

———, director. La Chienne. Les Établissements Braunberger-Richebé, 1931.

———. La Grande Illusion. Seuil/Avant-Scène, 1971.

———. “La Grande Illusion.” Le Petit Marseillais, 14 Oct. 1937, p. 6.

———, director. La Grande Illusion. Réalisation d’art cinématographique, 1937.

———, director. Le Crime de monsieur Lange. Films Obéron, 1935.

———. Lettre à Édouard Aget. 10 July 1937. Jean Renoir Papers, 1915-1927. Young Research Library Special Collections, UCLA.

———. Lettre à Louis Aragon. 25 June 1937. Jean Renoir Papers, 1915-1927. Young Research Library Special Collections, UCLA.

———. Lettre à Maître Rappoport. 10 July 1937. Jean Renoir Papers, 1915-1927. Young Research Library Special Collections, UCLA.

———. Lettre aux éditions Albin Michel et à Jean des Vallières. June 1937. Jean Renoir Papers, 1915-1927. Young Research Library Special Collections, UCLA.

———. Ma vie et mes films. Flammarion, 1974.

———, director. Tire-au-flanc. Néo-Films, 1928.

———, director. Toni. Les Films d’aujourd’hui, 1935.

Von Richthofen, Manfred. Le Corsaire rouge, 1914–1918, journal de guerre. Translated by Ed Sifferlen, Payot, 1932.

Service historique de la Défense, SHD/AI, 1 DA 68, dossier de carrière militaire du général Armand Pinsard.

Spaak, Paul-Henri. “Paul-Henri Spaak: Autobiographie—Manuscrit.” European University Institute Historical Archives of the European Union, https://archives.eui.eu/en/fonds/188482?item=PHS-09.01-862. Accessed 29 June 2018.

Des Vallières, Jean. Kavalier Scharnhorst. Albin Michel, 1931.

Viry-Babel, Roger. “La Grande Illusion de Jean Renoir.” Les Cahiers de la Cinémathèque, printemps, 1976, pp. 37–63.

De Vita, Philippe. Jean Renoir épistolier: Fragments autobiographiques d’un honnête homme. L’Harmattan, 2015.

Weiss, Pierre. Pinsard chez les Boches. Berger-Levrault, 1925.

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